Cet article est une note de lecture, et une réflexion, sur le très beau livre que je viens de lire :
Sang et Or, un drapeau Européen pour la Provence
De Rémi Venture
Aux Editions Òsservatòri, Collectif Prouvençò
Edité en 2014
Pourquoi s'intéresser à un tel sujet : tout simplement parce qu'un "Estrangié" qui veut adopter et se faire adopter par un Pays, à travers les santons d'abord, puis les coutumes, doit aussi comprendre sa langue, son histoire.
Il faut :
1 – Inscrire ses enfants à un cours de provençal si leur école en propose. Sinon, en faire la demande au chef d’établissement, au recteur et via les associations de parents et celles de défense de la langue. 2 – Chercher soi-même des cours pour adulte, parfois gratuits. 3 – S’abonner à des revues (Vaquo d’Aqui, Me dison provenço…), écouter des émissions et de la musique (comme Vaqui sur France 3, ou les disques de Moussu T e lei jovents, un groupe marseillais qui chante en langue d’Oc).
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Artemis, by Moussu T e lei Jovents
Artemis by Moussu T e lei Jovents, released 23 April 2013 1. Embarcatz 2. Mistral 3. Artemis 4. Tout mon temps 5. Occitanie sur Mer 6. Sur ma serviette 7. Tentacules 8. Lei Rainards 9. Le Bateau 10
Moussu T e lei Jovents
Mais passons au sujet, le livre.
La fiche de Promotion du livre est très claire sur l'objet :
démontrer l'existence d'un drapeau Provençal ancien, très ancien.
Question très importante qui se résume ainsi :
Uno regioun, une identita, uno lengo
Ou dit en Français :
Une région, une identité, une langue
Cette démonstration a pour but d'étayer l'existence d'une unité Provençale réelle, autour d'une unité politique, d'une unité de langue, autour d'un symbole qui assure cette unité, le Drapeau.
C'est d'autant plus important que :
au sens ethnographique du terme et non au sens anthropologique, il ne faut voir dans le mot race que celle d'un peuple lié par la langue, enraciné dans son pays et son histoire
Les ethnologues estiment que, mises à part les différences génétiques et phénotypiques, les populations humaines sont principalement différenciées par leurs us et coutumes qu'elles se transmettent de génération en génération. L’espèce humaine se caractérise donc par une très forte dimension culturelle. C'est pourquoi le concept d’ethnie est de nos jours préféré à celui de race, en ethnologie. Les différences culturelles permettent de définir des ethnies extrêmement nombreuses. La notion de nation comme de communauté religieuse, de même, s’abstrait de la notion de race ou d'ethnie : ce qui compte pour la définir est moins ce que ses membres sont que ce qu’ils souhaitent en commun.
A toute cette conception de la particularité régionale, il faut rajouter le problème essentiel de l'enseignement du Provençal.
Il existe deux écoles, la plus ancienne, celle qui a été la première à donner au Provençal une graphie, un dictionnaire, une grammaire pour en faire définitivement une langue et non un dialecte ou un patois.
C'est la graphie Mistralienne qui donne tous les moyens au Provençal, et à ses 4 régions différentes, les possibilités de s'unifier sur une même base dans le respect des particularismes.
La force du dictionnaire du Trésor rédigé par Mistral c'est d'avoir étudier sans sectarisme et mis dans son dictionnaire, derrière chaque mot provençal les déclinaisons des différentes déclinaisons que d'ailleurs Mistral fait apparaître sur sa carte de la langue d'Oc.
Mais depuis est arrivé une autre école, celle de la graphie occitane, plus proche de la graphie des Troubadours, à ce qu'il se dit, la vraie question reste pour moi celle de l'existence d'une graphie des troubadours à ces époques lointaines.
Ainsi dans le journal du Conseil Général des Bouches du Rhône, Accent, chaque mois un article est publié en Provençal, graphie Mistralienne, un autre en graphie dite classique. Ces deux articles font la même taille, malheureusement la guerre est ouverte.
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Et comme un fait exprès, l'article de ce mois de Mars, en graphie normale pour moi, parle de l'enseignement du Provençal à l'école.
Pour se féliciter d'une légère progression, mais malheureusement de la faible représentation de cet enseignement sur le total.
Et toutes les études démontrent que l'apprentissage d'une langue peut se faire dès le primaire et même est bénéfique.
Le Provençal est une langue latine, dont les déclinaisons sont nombreuses. Même elle ouvre à des sons nouveaux.
Et en ce sens, son apprentissage et son développement sont bénéfiques. Mais cette ambiguïté arrive en même temps qu'une certaine volonté des défenseurs d'une langue d'Oc unique de l'adosser à un drapeau qui se voudrait fédérateur, celui de la croix de Toulouse.
Et cette ambiguïté au niveau de la langue Provençale, de son écriture ne peut pas aider à sa sauvegarde ni à sa renaissance.
Les anciens que je croise parlent le Provençal avec cette graphie Mistralienne et pas d'autres. Tous les panneaux, tout ce qui est fait depuis plus de 150 ans pour cette renaissance est fait dans cette graphie.
Et de plus elle est lisible telle que. Le conteur Remy Salamon par exemple fait ses spectacles dans cette langue.
Le livre que je présente donc s'est attaché à démontrer que le drapeau Provençal existe depuis très longtemps, plus longtemps très honnêtement que je ne croyais.
J'avais même ce sentiment que ce drapeau Provençal, était d'origine Catalane comme on peut le lire d'ici ou là comme sur
http://svowebmaster.free.fr/drapeaux_Provence.htm
ou
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"La Provence traditionnelle arbore deux drapeaux différents qui descendent des blasons des deux familles de comtes qui gouvernèrent la région au Moyen-âge. La première est celle de Catalogne dont le premier membre Raimond-Berenger III comte de Barcelone obtint la Provence par mariage en 1125.Son blason est d'or aux quatre pals rouge.
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La deuxième est celle d'Anjou. Charles I (1226-1285), comte d'Anjou et du Maine, 10 ème fils de Louis VIII roi de France et frère de Saint Louis, qui épousa en 1246 l'héritière des comtes de Barcelone.
Historiquement ensuite, la Provence revient en 1481 à la France. Elle est une Province avec un parlement à Aix en Provence et un gouverneur non héréditaire nommé par le Roi. La province fut dissoute à la Révolution (1790) et transformée en 3 départements : Bouches du Rhône, Var et Basses Alpes. En 1793, les districts d'Apt et d'Orange furent détachés des Bouches du Rhône pour former avec Avignon le département du Vaucluse. En 1860, les districts de Grasse et de Saint-Paul-de-Vence sont détachés du Var pour créer avec le comté de Nice le département des Alpes-maritimes."
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Mais ceci est fait en oubliant que la Provence est bien antérieure. La carte de Provence de 1125 est déjà à l'époque quasi identique à la Provence actuelle.
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Et en 1180, la carte de France montre que la Provence est dominée par deux parties, le Marquisat de Provence qui tombe sous la coupe des Comtes de Toulouse, le reste du Comté de Provence qui reste rattaché au Comté de Bourgogne, lui, étant dépendant de l'Empire Romain Germanique.
La Provence existe donc déjà bien avant.
En quoi cela peut-il être important.
Ce livre développe toute son étude comme un roman policier et avance dans le démêlé de l'intrigue à pas comptés.
L'éclatement de l'empire de Charlemagne en 845 donne le Comté de Provence aux Rois Carolingiens. L'éloignement du pouvoir central fait que le roi carolingien donne le comtat à son beau frère, Boson qui érige un royaume à la mort de Charles II le chauve, profitant du vide juridique ainsi créé.
Il construit alors son Royaume d'Arles en 879. Les péripéties sont nombreuses, les luttes aussi puisque la famille Boson part en lutte pour gagner le royaume d'Italie. Cette famille, nommée les Bosonides, commence à régner dès 903.
Les lois de succession de cette famille entraînent le partage de la Provence en son Comté, le plus important mais, et nous retrouvons notre drapeau, le Marquisat au Nord qui lui est rattaché par mariage au Comtat de Toulouse.
(Voir la carte de la Provence ci-dessus)
En 1032, la Provence bascule dans le giron de l'Empire Romain Germanique.
Mais il est intéressant de lire cette étude de Rémy Venture qui démontre que de nombreux blasons des villes et des familles alpines en Savoie, Haute Savoie, Genève portent déjà des éléments de ce drapeau sang et or ou argent et or.
La fin de la famille Bosonide, par les mariages, donne le Comté de Provence à la famille Catalane de Barcelone jusqu'en 1245.
De nombreuses études, et pas que celle de ce livre, donnent le blason à pals sang et or très utilisé en Bourgogne, en Régions Alpines dès cette période alors qu'il n'apparaît qu'au XIVème siècle à Barcelone.
Ce drapeau sang et or est donc bien antérieur à ce qu'on veut bien écrire comme je l'ai dit au dessus par abrégement de l'histoire. Il faut lire ce livre tant il est riche, bien plus que ces raccourcis.
Pour en arriver à la question finale, quel drapeau pour la Provence aujourd'hui ?
Un drapeau important pour la définition de la défense de la région Provence, à l'intérieur de la Nation, mais un drapeau protecteur des us et des coutumes qui font la richesse de cette région.
Dès l'écriture de Calendau en 1867, Fréderic Mistral cherche un blason pour la Provence aidé par l'archiviste départemental Louis Blancard
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L'auteur trouve le Blason actuel développé par le Conseil Régional depuis 1999 très réussi.
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Le blason du Languedoc Roussillon lui rappelle la double appartenance de cette région dont une partie a dépendu de nombreux siècle de la Maison de Barcelone avant d'être rattachée au Comtat de Toulouse.
Le sticker distribué par le collectif Provençal est d'ailleurs un bon compromis lui aussi.
Un livre à lire et écrit en Provençal et en Français, donc pour tous.