L'abbaye Saint Michel de Frigolet est basée sur le Massif de la Montagnette, massif situé au Nord des Alpilles et au sud de la boucle que forment la Durance et le Rhône à leur confluence. Comme son nom l’indique, la Montagnette est une montagne à échelle réduite, située au nord-ouest du département. Elle offre, sur quelques kilomètres seulement, escarpements rocheux, versants couverts d’herbes de la Provence, vallons cachés où poussent oliviers, amandiers ou encore abricotiers !
Le nom de Frigolet vient, d'après Frédéric Mistral du mot provençal "ferigoulet" qui veut dire "lieu où le thym abonde".
C'est ce qui explique la qualité particulière des fromages de chèvres et de brebis qui sont vendus dans les marchés locaux.
D'ailleurs, à notre arrivée, à travers bois, nous avons pu admirer le travail pastoral à l'ancienne d'un berger qui menait son troupeau mixte vers les pâtures.
Je suis allé dans cette Abbaye pour une visite rapide et très largement incomplète puisque j'y suis allé pour faire des courses.
D'autres produits sont disponibles dans cette boutique, des produits de grandes qualités, miels, confitures, liqueurs, etc….
Des livres, des disques, des cartes postales.
Et bien sûr des santons.
L'élixir du Révérend Père Gaucher, la Liqueur de Frigolet, élaborée initialement à l'abbaye Saint-Michel de Frigolet par les prémontrés ou pères blancs, à base d'extraits de différentes plantes cueillies dans la Montagnette dont le thym et le romarin.
Suite aux ennuis des frères Prémontrés, la recette est vendue à une usine de Tarascon où elle est toujours produite. Elle est vendue aussi dans la boutique de l'Abbaye et fait ainsi un revenu pour ses occupants.
C'est le véritable élixir rendu célèbre par le conte d'Alphonse Daudet, écrit en 1866 dans les Lettres de Mon Moulin avec son texte "L'Élixir du Révérend Père Gaucher".
Mais cette Abbaye possède une vraie histoire et un vrai lien avec le Félibrige.
En 1133, un monastère des Chanoines réguliers de saint Augustin existe. Saint-Michel commence à être bâti au Xème siècle par les moines de Montmajour. Le Monastère tombe en désuétude et les moines le quittent au XIVème siècle.
Mais l'église romane St Michel est bâtie au XIIème siècle.
Ainsi que le Cloître
En 1675, l'abbaye est de nouveau occupée par des augustins et des religieux Hiéronymites. Notre Dame de Frigolet s'appelle alors Notre Dame du Bon remède. La bibliothèque va être détruite en 1788 par un incendie.
Puis les 4 derniers moines sont chassés en 1791 par les révolutionnaires.
De 1839 à 1841, le site devient un collège, créé par Monsieur Donat de Monteux. Il est fréquenté par le jeune Mistral. Ce collège est à quelques kilomètres de Maillane et à quelques cent mètres du Sommet de la Montagnette à 168m.
Une plaque rappelle ce passage.
Sur la fin de sa vie, le grand poète Frédéric Mistral, prend un plaisir visible à se remémorer l'heureux temps de son séjour à Frigolet.
L'odeur de la montagne, dès qu'il faisait du soleil, nous rendait ivres.
Pour courir, nous avions toute la montagnette. Quand venait le jeudi, ou même aux heures de récréation, on nous lâchait tel qu'un troupeau et en avant dans la montagne, jusqu'à ce que la cloche nous sonnât le rappel.
Aussi, au bout de quelque temps, nous étions devenus sauvages, ma foi, autant qu'une nichée de lapins de garrigue... Et nous, nous roulions dans les plantes de thym.
« … O baume ! O clarum ! O regale ! O miramen ! O pas de la naturo manso ! Que relarg de bonur e de pantai paradisen avès dubert sus moun enfanço ! »,
« O arômes ! Ô clartés ! Ô délices ! Ô mirage ! Ô paix de la nature douce ! Quels espaces de bonheur, de rêve paradisiaque, vous avez ouverts sur ma vie d'enfant !....
S'écriait Frédéric Mistral, se souvenant dans son vieil âge, des heureux moments de l'enfance, à Frigolet dans la Montagnette.
C'est l'amitié entre le jeune Mistral et le jeune Daudet qui fera que le premier l'emmènera s'y promener quand Alphonse Daudet rejoindra le Midi pour s'y soigner en 1861.
Les lettres de Mon Moulin paraissent en 1866.
En 1858, les bâtiments sont rachetés par l'église et la vie conventuelle restaurée par le père Edmond Boulbon qui fonde une communauté de chanoines réguliers de l'ordre des Prémontrés.
La chapelle Notre Dame du Bon Remède est enchâssée dans une Eglise néogothique en 1866.
La communauté va recevoir le titre d'Abbaye en 1869. .
Par ailleurs, les chanoines vont partir rénover l'abbaye de Conques dans l'Aveyron où seront redécouvertes les reliques de Ste Foy et le pèlerinage rétabli. Pendant les travaux de restauration du chœur de l'abbatiale romane, les Pères font la découverte des reliques de la sainte martyre. Elles avaient été emmurées au cours des guerres de Religion.
Pour cette Période, à St Michel de Frigolet, les Chanoines entourent l'abbaye d'une enceinte néo-médiévale, avec tours, courtines, créneaux et mâchicoulis.
De vastes bâtiments sont édifiés pour recevoir les pèlerins ; une ferme, des ateliers et une église luxueusement décorée s'y ajoutent. En 1880 le gouvernement français décrète la dissolution de la communauté et lui ordonne de quitter le monastère.
Le refus des Prémontrés, soutenus par les fidèles du secteur, provoquera le fameux "siège de Frigolet".
Alphonse Daudet, dans son roman Port-Tarascon, relate comment l'armée est venue fermer l'abbaye en 1880.
Le siège de Frigolet :
Dès la Toussaint 1880, les Provençaux étaient montés par milliers au monastère pour tenter d'éviter l'expulsion. Beaucoup d'entre eux s'enfermèrent à l'intérieur de l'abbaye, parmi lesquels Frédéric Mistral. A cette nouvelle, la Préfecture de Marseille et le Gouvernement mirent en mouvement une véritable armée contre Frigolet : gendarmerie, infanterie, cavalerie, flanquées de généraux, de préfet, de sous-préfet, de commissaire de police... En tout, près de deux mille hommes pour chasser de leur couvent une quarantaine de religieux.
L'expulsion est officiellement annoncée le 5 novembre, tandis que les troupes se déploient depuis deux jours sur la Montagnette. Ce 5, un commissaire embarrassé notifie, à travers une porte, au Père Hermann, qui représente le Père Abbé, l'arrêté d'expulsion dont il est porteur. Le Père refuse d'obtempérer. La Montagnette est alors investie par les escadrons de cavalerie et les bataillons d'infanterie, qui se déploient sur les collines en position d'attaque, sous les immenses éclats de rire de milliers de Provençaux qui chantent avec force leur fameux "Prouvençau e Catouli".
A six heures du soir, il est fait défense de traverser les lignes, d'apporter de la nourriture aux assiégés, de sortir de l'abbaye : le blocus est total.
Le 6 novembre, un capitaine du 141e régiment d'infanterie, accompagné d'un gendarme, monte demander à nouveau l'ouverture des portes de l'abbaye, on lui renouvelle le refus. La troupe cerne alors la boulangerie (aujourd'hui la Treille) et l'occupe aussitôt.
Dans l'après-midi du dimanche 7 novembre, un ballon vert est lancé par les assiégés et s'élève lentement dans le ciel, avant d'être abattu par les militaires. Mais chacun sur la Montagnette avait eu le temps de voir le signe de vie que leur adressaient les assiégés.
Sur décision du préfet, des crocheteurs montent à Frigolet, à la naissance du jour du 8 novembre, accompagnés du commissaire de police et de douze gendarmes. Ils poussaient une charrette remplie d'instruments d'escalade, de cordages, de chaînes, de haches, de massues, de poutres et de poutrelles en forme de bélier, comme si on devait prendre d'assaut une véritable forteresse !
Le commissaire fait de nouvelles sommations devant la grille de fer pour y attirer les assiégés, tandis qu'il envoie ses crocheteurs forcer une porte opposée, celle dite du "cloître". Une véritable ruse de guerre...
Entendant les coups de hache défoncer les portes, les Prémontrés se réunissent alors dans la salle du Chapitre où, après avoir violé l'entrée de l'abbaye, se présente le commissaire de police, ceint de son écharpe, chapeau sur la tête, brandissant son décret d'expulsion.
Le Père Abbé, dans cet instant poignant, lit une protestation solennelle. Devant les forces de police, ébahies et décontenancées, les Pères chantent alors l'office que personne n'ose troubler, jusqu'à ce que le Père Abbé leur donne sa dernière bénédiction.
Les scellés sont apposés sur l'église, tandis qu'éclate un violent orage et que tombe une pluie torrentielle. Agents et gendarmes font évacuer l'abbaye de tous ceux qui s'y trouvaient depuis plusieurs jours pour soutenir les Pères dans ce moment difficile.
Et, à 8 h 30, toujours sous le déluge qui tombe du ciel, les Prémontrés sont poussés dans les voitures amenées spécialement par la préfecture, puis conduits vers Tarascon, escortés de onze brigades de gendarmerie et d'un escadron de dragons, mais surtout acclamés par les foules massées tout le long du parcours et jetant des fleurs.
Pendant de long mois, l'abbaye de Frigolet fut gardée militairement.
Les Pères partent en exil en Angleterre ou en Belgique pour Xavier de Fourvières par exemple.
Il avait été reçu en l'Abbaye de St Michel du Frigolet en 1874, il avait pris alors le nom de Xavier de Fourvières.
Avec Frédéric Mistral, il a œuvré pour la renaissance de la langue d'oc, comme prédicateur et comme auteur d'ouvrages.
Il fut majoral du Felibrige. Son nom en provençal est Savié de Fourviero. Il va œuvrer toute sa vie pour la défense de la langue provençale et pour restaurer la prédication en provençal.
Son œuvre la plus importante est ce dictionnaire : "Lou Pichot Tresor" qui parait en 1902.
Une plaque commémorative a été érigée dans l'Abbaye.
En 1902, Émile Combes, surnommé "le petit père Combes", ex-séminariste devenu athée et adversaire déterminé de la religion, est porté au gouvernement par une poussée radicale. Il organise la suppression des écoles catholiques, oblige à la fermeture de nombreuses congrégations, et à ce titre, les terres et bâtiments de St Michel de Frigolet, vides depuis le siège de 1880 sont confisqués.
Les Pères ne pourront revenir qu'en 1923, pour y retrouver l'abbaye.
En 1982, l'abbatiale recevant tant de pèlerins est élevée au rang de basilique.
Aujourd’hui, la communauté religieuse de Saint-Michel de Frigolet qui y est installée appartient à l'ordre des chanoines réguliers de Prémontré.
Les frères se consacrent principalement à la prière, toutefois, ils accueillent également les visiteurs, hôtes de passage, jeunes et retraitants.
Depuis 1988, des Sœurs de St Charles de Nancy participent à la vie contemplative et active des Prémontrés. Abbaye St Michel de Frigolet dont l’abbatiale néogothique enveloppe la chapelle romane de Notre-Dame qui abrite 14 toiles du peintre Mignard et est ornée de boiseries du XVIIème siècle.
L'hostellerie touristique de St Michel de Frigolet comporte deux parties, un hôtel-restaurant, des salles et jardin.
Un autre bâtiment est une auberge, Maîtrise Saint-Norbert, bâtiment d'accueil collectif.
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Une visite à faire sur au moins une journée pour tout visiter.
D'autant qu'une aire de parking, piquenique, terrains de jeux et départs de marches dans la Montagnette est organisée sur le haut de l'Abbaye.