Chaque année, le site de St Jean de Garguier sur la commune de Gèmenos est l'objet d'une fête pour justement la St Jean.
La fête commence par une promenade jusqu'au château de ce hameau, château privé qui ouvre ses portes ce jour là pour l'arrivée des charrettes et des mules. Un gros déjeuner est offert avec saucisses, charcuteries diverses, fruits et vin. La fête est ouverte par le Maire du village. Nous n'irons pas à cette partie de la fête.
St Jean de Garguier est une longue histoire. Le hameau de Gargar existait dans l'antiquité et c'était le seul hameau de cette plaine de l'Huveaune. Gargar est la graine dans cet ancien dialecte phénicien. Le peuplement de la plaine de l'Huveaune est d'abord phénicien puis grec avec la création de Massilia au 7ème siècle avant Jésus-Christ. Il faut nourrir la population massilienne, et les espaces les plus beaux et les plus fertiles sont ceux de cette plaine à la terre si riche et c'est d'ailleurs pour cette raison que l'homme du 20ème siècle a couvert cette terre de richesse, d'habitats, de zones artisanales et industrielles, d'autoroute et de voies ferrées pour rendre ces terres incultivables et préparer un monde de pénurie pour le 21ème siècle, un autre débat certes mais je le dis aussi là…
Ce hameau devient vite alors un marché important connu dès le 2ème siècle avant JC où les échanges sont nombreux sur ce carrefour des grandes voies. Les fouilles dans le vallon ont permis de trouver de nombreuses inscriptions, de nombreuses monnaies qui attestent de cette richesse. Au moment de la conquête par Jules César, 1er siècle avant JC, c'est le lieu le plus important de cette plaine de l'Huveaune. A cette époque Gallo-Romaine, un temple dédié à Bacchus et à Diane y est érigée et des thermes y sont adjoints. Des statues le prouvent et les thermes ont fait l'objet de plainte des habitants qui voyaient ces thermes non entretenus par les responsables. Si les collines aujourd'hui sont asséchées, des restes d'aqueduc ont été retrouvés au 18ème siècle menant l'eau des collines et de la Ste Baume.
Le temple païen va être transformé en église après l'édit de Constantin en 313 après JC. Gargarius devient un lieu de culte chrétien et même un évêché au 5ème siècle. Mais sur ordre du Pape, l'évêché redevient église en 418.
Devenu Gargarie, le lieu voit affluer de nombreux pèlerins pour St Jean Baptiste, le purificateur par l'eau, la continuité des thermes et des eaux amenées jusqu'ici.
St Jean de Garguier n'est autre que St Jean Baptiste, le prophète qui a annoncé la venue du Messie et qui l'a baptisé. C'est à l'intercession de St Jean Baptiste qui fait que depuis 1600 ans les pèlerins viennent ici chercher grâces et guérisons.
La prospérité de St Jean de Garguier s'interrompt avec les invasions barbares du 8ème siècle, déjà les invasions barbares…Les armées arabo-musulmanes envahissent la Provence. Elles sont enfin définitivement chassées en 973 par Guilhem le Libérateur et non par Charles Martel.
Les habitants de Gargarie se réfugient dans la montagne, d'où la chapelle de St Clair au dessus du prieuré.
Le calme revenu, St Jean de Garguier est reconstruit et en 1030, la preuve de la basilique dédiée à St Jean Baptiste existe dans un texte. En 1205 l'évêque de Marseille cède le prieuré à une noble qui devient ainsi la première abbesse de St Pons
En 1407 l'abbaye de St Pons est en pleine décadence. C'est dans cette période qu'est construit l'enclos qui permet d'accueillir les pèlerins. Les dortoirs permettent de recevoir 130 malades en même temps. En 1600, on compte plus de 300 membres dans la confrérie de St Jean de Garguier. Les nombreux ex-voto démontrent des guérisons datant de cette époque.
Parmi les pauvres pèlerins passés par ce lieu, on trouve St Benoît Joseph Labre qui partait à pied vers Rome. La grange où il a dormi a été transformé en oratoire en 1892 dans le porche d'entrée du prieuré.
Les destructions des "révolutionnaires" de 1789 n'épargnent pas le prieuré. Mais les ex-votos continuent d'affluer et de démontrer l'attachement des populations qui continuent à venir en pèlerinage.
Le culte continue dans la chapelle jusqu'en 1914 grâce à la famille d'Albertas de Gèmenos.
En 1920, le lieu devient une colonie de vacances de charité et le prieuré est enfin classé aux monuments historiques en 1927. En 1939, la colonie de vacances n'existe plus, les réfugiés arrivent, puis les bâtiments sont abandonnés à la végétation.
En 1952, l'évêché de Marseille retrouve le prieuré et la mobilisation permet sa restauration en 1954.
A partir de 1982, les "Amis du prieuré de St Jean de Garguier" entament la restauration. Les fonds sont levés pour restaurer le prieuré dont les ex-votos. Ceux-ci sont sauvés en 2000.
Aujourd'hui, la maison est sauvée et sert d'accueil, d'hostellerie.
Les pèlerinages sont devenus de plus en plus importants et permettent de finaliser les restaurations encore très importantes.
La chapelle du Prieuré est riche en ex-votos superbes.
La journée du pèlerinage vaut comme dans l'ancien temps la réunion de quelques exposants, comme chaque année. Voir mon dossier sur le pèlerinage de 2014.
http://l-estrangie-e-li-santoun.over-blog.com/2014/06/saint-jean-de-garguier-24-juin-2014.html
La messe va être dite en plein air par un temps superbe dans les terres jouxtant le prieuré.
C'est grâce à un défilé que le clergé se présente suivant les Dansaire du Garlaban. Le Maire de Gèmenos vient fleurir la statue de St Jean avec un bouquet offert par le conseil municipal, au grand dam certainement des calottes de la laïcité idiote, celles qui refusent le respect des traditions, celles qui veulent interdire les crèches, celles qui veulent supprimer les fêtes taurines provençales.
C'est Robert Bruguière, le poète provençal d'Aubagne, enseignant de provençal à Gèmenos, qui chaque année fait un discours en langue provençale pour faire un hommage à St Jean, des discours chaque année très riches d'enseignements et d'appels à défendre coutumes et langues.
Escabarai en paroudian la crido dóu Mèstre de Maiano : "De Cujo, Gèmo fin qu'en Aubagno, la gardaren, riboun ribagno, nouesto rebello lingo d'O!"
J'approfondirai en parodiant la proclamation du Maître de Maillane (Frédéric Mistral) : "de Cuges, Gèmenos jusqu'à Aubagne, nous la garderons, coûte que coûte, notre rebelle langue d'O!"
La messe
Et le défilé de fin
La suite de cette journée est un immense repas puis le soir, un concert que je relate ailleurs.