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En 2014 déjà, tout le monde, et moi en particulier, disait la nécessité de l'information du consommateur sur l'origine réelle de la fabrication des santons, la mention obligatoire et vérifiable. Sinon, ce serait une tromperie.

En 2014, pris la main dans le sac, Patrick Jarque avait une réponse facile parue dans la presse alors, dans la Provence puis par exemple dans cet article du Parisien du 9 Décembre 2014 :

http://www.leparisien.fr/economie/aubagne-les-santons-de-provence-venaient-de-tunisie-09-12-2014-4358607.php

" Le Moulin à huile, a reconnu qu'il délocalisait une partie de sa production en... Tunisie. Un arrêté municipal de 2001 ne précise-t-il pas pourtant que la foire marseillaise, qui accueille 31 exposants cette année, est « réservée uniquement aux artisans fabricants de crèches et de santons de Provence suivant les spécifications de fabrication garantie Provence » ?"

Le Parisien du 09/12/2014

Dans cet article, l'auteur cherche à faire croire que cette production est réservée aux grandes surfaces et que ce qu'il présente à la foire de Marseille est conforme aux obligations.

Les santons étrangers sont méchantsLes santons étrangers sont méchants

J'ai déjà pu en parler plusieurs fois comme ici

http://l-estrangie-e-li-santoun.over-blog.com/2015/09/sault-vaucluse-premier-salon-interregional.html

ou là :

http://l-estrangie-e-li-santoun.over-blog.com/2015/11/marseille-foire-aux-santons-2015.html

Et toujours avec cette même colère. Ces pratiques sont irresponsables, le silence des organisateurs est coupable, et souvent le silence aussi des Syndicats ou des Confréries est inacceptable.

En me promenant dans mes lectures, j'ai trouvé dans mes livres ou journaux divers un texte superbe écrit dans l'Armana Prouvençau de 1968 par Andriéu Aries.

Les santons étrangers sont méchantsLes santons étrangers sont méchants
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La traduction que j'en ai faite nous permet de retrouver toute cette importance des santons dans la vie provençale, tout cet échange qui se fait avec eux, ce langage qu'on leur prête et ces puissances qui leur sont données.

La première partie du texte est la mise en place et l'apparition de quelques santons figures de proue de ce conte.

Les santons étrangers sont méchantsLes santons étrangers sont méchantsLes santons étrangers sont méchants
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Les Santons de Provence, Conte de Noël

C'était une belle nuit de Noël dans le monde. Le ciel étoilé étincelait magnifiquement, tranquillement, dans une douceur calme, et là-haut l'enfant Jésus regardait, en souriant divinement, les enfants de la terre sommeillaient dans leurs berceaux.
Tout à coup, près de lui, un nuage bleu apparaît, glissant d'aise. Et dans ce berceau d'azur, bien abritées l'une contre l'autre, il se trouvait deux petites jumelles, encore endormies, deux petites filles, charmantes, roses et poupines comme deux anges.
C'est ainsi qu'apparaissaient les enfants de la terre.
Alors Jésus souffle un peu pour envoyer le nuage vers son destin, et la jolie nichée fut, soudain, dans la chambre d'une brave maison qui se nommait le "Mas de Mireille" sur une petite colline entre Marseille et Aubagne.

Ici vivait un jeune ménage heureux qui n'attendait, juste pour combler son bonheur, qu'une paire de beaux enfants à aimer. En attendant leur vœu, fidèle à leurs traditions et à leur foi, grâce à la grand-mère qui les avait enseignés, ils avaient bâti dans leur foyer une crèche merveilleuse, habitée de tous les santons de Provence.
Aussi en apportant l'étrenne calendale dont ils avaient rêvé, le fils de Dieu, qui fait toujours bien les choses, choisit dans la crèche quelque sept santons pour veiller tout au long de leurs vies sur la destinée de ces jolis enfants.

Et les parrains furent :
Bartoumieu, avec son air bonasse sous son bonnet blanc ; Roustide, le bastidan, avec son gilet à manches semées de fleurs et ses pantalons de velours ; Simon, le chef berger à la barbe fleurie, majestueux dans sa grande cape. Grasset, le petit vieux heureux qui allait toujours ramasser des escargots et des champignons ; Grassette, sa femme vivace, serrant sa chaufferette entre ses mains et portant sa marmite au bras ; Ferigoulet, l'enfant du mas dégourdi comme pas un que ses parents ont élevé dans la sagesse et les bonnes manières ; le Ravi enfin, toujours émerveillé de ce que fait le créateur, et toujours souriant.

Pensez un peu si les habitants du Mas Mireille furent émerveillés de la double naissance qui accomplissait si bien leur vœu. Pensez un peu, aussi, si avec un tel parrainage, les petites pouvaient se sentir heureuses de vivre dans un foyer ainsi prédestiné et dans un pays comme la Provence.

Puis vient la lutte entre les bons santons et le mauvais.

Hélas, il faut dire qu'au moment de cette histoire, il y avait aussi dans la crèche, un méchant petit santon, nommé Peto Figo (gibier de potence, ortolan). En colère de ne pas avoir été choisi par l'enfant Jésus, le grand méchant se jura de faire le contraire aux gentilles enfants.

Et les jours passèrent. Puis un matin, celles-ci se réveillant toutes souriantes, regardèrent à leur côté le laid Peto Figo qui leur dit en grimaçant :
- Me voici pour vous amener l'hiver, le froid, la tempête, les gros vents, tout ce qui siffle dans les lézardes et hurle dans les cheminées.
Mais pas plus loin que là, les petites effrayées entendent la voir de Bartoumieu qui ripostait :
- N'ayez pas peur ! Moi je vous garderai votre Mas bien chaud et le feu crépitant joyeux et étincelant, faisant danser jusqu'au plafond ses flammes rougeoyantes en y projetant l'ombre de vos jouets préférés.

Quelque temps plus tard, le santon grogneur vint vers les jeunettes :
- Tiens ! Je vous promets encore beaucoup de travail que vous aurez à faire, enfermées dans la classe, pendant que le soleil brillera sur la campagne, et plein de leçons assommantes que vous aurez à apprendre à la veillée au lieu d'écouter les contes de vos grands parents.
Mais Roustido veillait et dit aussi vite :
- Non, Non, va ! Vous serez bien brave. Le travail qui se fait dans la bonne humeur n'est pas assommant. De temps en temps, en suçant votre porte plume, vous aurez devant les yeux le clocher d'Allauch pointant sur les vertes collines et la Sainte Baume échevelée, coupant de sa masse sombre l'azur clair du ciel léger. Alors, oui, vous aurez le courage pour accomplir les classes de la vie !

Mais toujours la colère au cœur, Peto Figo revint à la charge et cria cette fois aux pauvres égarées:
- Allez, allez, j'enverrai contre vous des méchants enfants qui égratigneront vos joues roses, et parfois, vous piqueront le cœur, et aussi des filles mauvaises qui de toutes façons vous arracheront les cheveux, que ça fait bien mal.
C'est Simon, le berger, qui vint à son tour défendre ses filleules :
- Ah ! Pas plus ! Vous aurez trop d'amis dans les bocages et les petites vallées provençales. Soyez sans crainte ! Avec vous sont les grillons, sous les mottes de terre labourées à l'Automne, les reinettes vertes; cachées dans les roseaux de notre ruisseau, les papillons de neige voletant de fleur en fleur, les mêmes fleurs qu'au soleil d'été, les beaux lézards qui dorment au soleil sur les restanques dans leurs cuirasses vertes, tant d'autres choses encore…Et puis vos bons gros chiens qui devant le Mas ne sommeillent jamais que d'un seul œil.

Peto Figo, pourtant, encore plus hargneux, ne tarda pas à redonner des menaces :
- Eh ! Bien je vous amènerai les mauvaises odeurs de la ville et les fumées puantes des grandes usines proches.
La réponse, cette fois, vint de Grasset qui portait son fanal et dit :
- Pour fuir les malheurs du siècle, je vous mènerai dans les collines de Bras, un des mille cœurs de la Provence. Vous y aurez une petite bastide, avec un grand noyer devant la porte. Vous y humerez les senteurs parfumées que le petit vent cueille tôt le matin sur chaque touffe de thym, de lavande, d'aspic et de romarin, et aussi l'odeur envoûtante de l'herbe en fleur, l'odeur pénétrante des genets, et l'odeur piquante de la sarriette. Et vous en aurez tant dans la poitrine que vous en garderez l'empreinte toute votre vie !

Hélas ! Le méchant ne voulait pas céder, vous savez. Peto-Figo revint toujours haineux !
- Allez ! Je vous amènerai une mauvaise grippe et le gros rhume qui vous tiendra à n'en plus finir, fiévreuses, au fond du lit, et le mal de dents qui vous empêchera de manger des bonbons et de casser les amandes…
La vieille Grassette, qui attendait son tour, se dépêcha de dire :
- Oh ! Mais vous aurez pour vous seules, penchés sur votre berceau, votre grand-mère qui dans ses yeux bleus entasse tout l'amour du ciel, et votre grand père qui est rapide à chasser la fièvre, pour que la fièvre ne vous empoigne pas. Vous aurez l'immense amour de vos parents, vous en êtes la raison de vivre. Alors s'envoleront les petites misères de la terre.

Toujours en colère, Peto-Figo grinça plus et jeta un nouveau cri venimeux :
- Eh ! Bien, vous aurez de toute façon la grande laide ville qui vous enveloppera, avec son vacarme de mécaniques roulantes, le bruit d'enfer de ses travaux gigantesques, ses cris pointus qui trouent le cœur et le cerveau et qui rendent fou !
Dans un élan, ici, Férigoulet lança sa parade, symbole d'un avenir calme :
- Allons, allons petites amies, il reste assez de collines et de bois pour s'évader dans le calme, entre les oliviers et les amandiers mêlés ensembles et alignés sur les murets. Et vous y entendrez, l'âme en émoi, le chant de l'alouette et du chardonneret, et toutes les chansons que le soleil fait naître à midi, et le crissement des cigales qui a son écho profond dans le cœur des poètes... Et il y en aura assez pour vous hisser dans la pureté et la paix d'une vie heureuse !

La dernière partie du texte est aussi la conclusion. Le mauvais santon ne pouvait pas gagner. Il est hargneux, il est maladroit puisqu'il tombe, il est en plâtre et non en argile et surtout il est signé d'un pays étranger.

A l'époque du texte, ce ne pouvait être la Tunisie, ce fut l'Allemagne, nos amitiés n'étaient pas cicatrisées des années de guerre…

Mais le sujet reste vrai, le santon étranger envahit notre terre, sa présence n'est que guerre et déséquilibre de la crèche qui est notre monde.

Pour retrouver le bonheur et la tranquillité, il nous faut réunir nos forces provençales pour défendre nos coutumes, nos vérités et bâtir nous-mêmes notre monde.

La maladie vient de l'étranger, il faut chasser ces intrus pour que les parrains du peuple provençal, les félibres par exemple, puissent à nouveau veiller sur la destinée de la Provence et défendre son bonheur.

Mais sachez que les larrons veulent toujours avoir le dernier mot. Peto-Figo avait préparé encore un mauvais souhait. Mais en se gonflant de rage, que je vous dis pas combien, il se reçut mal sur ses pattes, et que, en roulant de la crèche, il tomba sur le sol en se cassant en mille morceaux. Alors arriva une chose affreuse, horrible ! Ce santon affreux était en plâtre et il y avait marqué en dessous "Made in Germany" !

Et voilà comment vont les choses !

Assez ! La planète malade était enfin guérie ! Alors les braves et les gentils filleuls des véritables santons de Provence virent dorénavant s'accomplir leur heureuse et merveilleuse destinée.

Tag(s) : #Santon et Santonnier
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