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Le mois de janvier, pour ceux qui résident en Provence ou qui peuvent venir y passer une fin de semaine, après les 4 mois de salons de santonniers qui vont de septembre à décembre, c'est le mois des crèches qui restent à voir et elles sont nombreuses, mais c'est aussi le mois des pastorales.
Il y a un grand nombre de pastorales, j'en ai montré quelques unes sur mon blog pour ceux que ça intéresse.
La Pastorale Maurel, écrite en 1844 et la plus célèbre et la plus jouée en Provence. Elle est l'œuvre d'Antoine Maurel, membre du Cercle Catholique dirigé par l'Abbé Julien.
Elle a comme source les Chants traditionnels de Noël en Provence comme ceux écrits par Saboli au 17ème siècle, musiques qui sont toujours utilisées pour des tas de chants comme l'hymne de la Nation Provençale, la "Coupo Santo".
Les chants de Noël, "li Nouvé", contenaient, bien sûr, l'annonce aux bergers, les préparatifs et le départ vers Bethléem, mais ils étaient aussi le lieu de tous les thèmes secondaire, les scènes burlesques, les embûches…
L'autre source de la Pastorale Maurel se trouve dans les santons qui réunissent les personnages et leurs présents.
Tout d'abord furent créés au début du 19ème siècle des chants sous forme de dialogue avec des marionnettes animées.
Le succès de la Pastorale Maurel est d'avoir changé ces marionnettes et ces chants de Nouvé en mettant en scène des humains affublés de la gaucherie et de la naïveté des santons qui, humbles villageois et pauvres paysans, viennent dire leur piété dans les soucis journaliers et dans les joies quotidiennes.
Pourquoi voir une pastorale, entre autre la Pastorale Maurel, est important pour les amoureux des santons, c'est que cette Pastorale remet en perspective complète ce que sont les santons et ce qu'est la crèche Provençale.
Oui, la crèche Provençale, c'est en final et en but permanent la représentation de la nativité.
Mais, et c'est sa richesse, la crèche Provençale, c'est sortir du seul contexte religieux pour présenter un peuple dans sa vie, dans ses joies et ses difficultés qui font partie intégrante du rituel de Noël.
La crèche de Noël Provençale, c'est la mise en avant de la vie d'un peuple passionné, de toute sa vie, de ses fautes, de ses disputes, de ses amours, de ses morts, de ses errances, mais un peuple qui voue un amour passionné pour la joie de la Naissance de Bethléem.
Tous les chants superbes de cette Pastorale sont disponibles sur un disque trouvable sur Internet et dont voici la couverture
Le livre de la Pastorale en bilingue se trouve aussi à l'achat sur de nombreux sites dans sa seule version reconnue dans toutes les écoles de Provençal.
Si j'ai fait ce long article pour vous donner l'envie de voir cette pastorale, c'est aussi pour répondre à tous ceux qui voudraient une crèche seulement religieuse ou quasiment religieuse, taisant la fête du village, cachant les beuveries et autres vilenies de tout ce petit peuple, une crèche aseptisée en quelque sorte de tout ce qui fait la vie de la Provence, comme d'ailleurs de la vie en général.
La crèche Provençale, reconnue et mise en avant par l'Abbé Julien comme moment privilégié des fêtes calendales, est cette même crèche mise en théâtre, avec toute la vie qui finira bien sûr devant l'enfant Jésus mais encore dans une tripotée de galéjades. Quand je peux lire de-ci de-là, comme sur le site de l'Escolo de la Mar, que la crèche ne doit pas contenir ceci ou cela, le café en particulier, je me demande ce qu'était l'auberge de Benvengu qui tient tout le troisième acte.
Les interdits sont justifiés quand ils font sortir la crèche de son contexte originel, le Père Noël, le sapin ne sont pas provençaux. Le militaire, le gendarme et le médecin du 20ème siècle n'ont rien à y faire.
Ainsi de suite….
Mais tout ce qui montre la vie riche joyeuse et triste de la Provence du 19ème siècle est parfaitement à sa place n'en déplaise aux pisse-froids.
Voici donc la version de la Maurel jouée par "Parlaren Bédarrido" dans une superbe salle.
Acte 1
C'est d'abord le tableau du réveil des bergers. Nicoulet entend des voix qui chantent, un chœur de voix qui annoncent la venue du Messie, des lumières éclairent le ciel…Il réveille les autres bergers qui n'y croient pas et préfèrent dormir.
C'est alors qu'un ange arrive et leur chante d'aller voir ce seigneur rédempteur qui est né là bas vers l'étoile.
Puis ce sont les voisins qui arrivent à qui ils apprennent la nouvelle. Tous ont des présents ou presque et ils s'en vont vers le nouveau né.
Arrive alors l'aveugle et son fils cadet, il a perdu la vue quand son enfant aîné a disparu volé. Il est fatigué mais il veut lui aussi aller à Bethléem.
Arrive le Boumian avec son fils. Le Boumian sent qu'un évènement étrange a lieu que sa science maléfique n'explique pas. Il se dispute avec son fils qui se rebelle, mais ils se cachent car arrive quelqu'un.
C'est le meunier, tout fier de son âne, qui a entendu des bruits sur la colline et qui y va derechef.
Arrive le rémouleur Pimpara, qui voudrait raconter son histoire, trop longue, et qui préfère boire…mais il doit fuir car un bruit se fait entendre et il ne veut pas faire voir sa gourde de vin qu'il garde pour lui.
Arrive Pistachié qui a peur de l'orage qui gronde dans les nues. De peur, il se cache face contre terre comme l'autruche.
Le Boumian, tout heureux de cette aubaine, vient acheter l'ombre de Pistachié contre son âme.
Mais Jiget, l'autre valet, bègue, est à la recherche de Pistachié pour le maître de l'auberge Arrive aussi Pimpara qui veut emmener Pistachié vers Bethléem, les deux compères s'en vont croyant avoir l'argent du Boumian pour aller le boire, mais cet argent a été revolé par le fils du Boumian qui garde Pistachié avec lui quand Jiget et Pimpara s'en vont.
Acte 2
Cet acte se passe au village où on va assister au réveil des vieux, des anciens. Flouret qui a entendu la bonne nouvelle chante l'une des plus belles mélodies de cette Pastorale, "Veni d'ausi", "je viens d'entendre".
Il est rejoint par d'autres bergers puis par les voisins qui ont tous entendu.
Ils vont prévenir Roustido, qui, après quelques hésitations, accepte de partir à Bethléem mais pas seul, et il va réveiller son compère Jourdan.
Jourdan et sa femme Margarido se disputent comme depuis toujours, elle est acariâtre, et lui un peu fainiasse.
Ils s'en vont vers Betléem en décidant de passer par l'auberge pour faire une pause et récupérer l'âne de Margarido qui y est en pension.
Acte 3
Tout cet acte se passe à l'auberge de Benvengu, gendre de Margarido et Jourdan.
C'est d'abord Pistachié qui arrive, il a pu échapper au Boumian et de peur va se cacher dans la niche du chien.
Benvengu, depuis que sa femme est morte, noie son chagrin dans le vin dont il chante les bienfaits.
Benvengu attend Pistachié mais en fait c'est Pimpara et Jiget qui arrivent et n'expliquent pas où est Pistachié.
Ce dernier reprend enfin courage et sort de sa niche pour raconter ses aventures qui deviennent des faits grandioses.
Arrive le meunier
Puis les trois vieux.
L'occasion est trop bonne pour faire ripaille dans une immense taulejado pendant que Margarido va se reposer.
Pendant cette ripaille, ils y vont tous un par un de leur couplet en l'honneur du manger et du boire.
Ils débarrassent vite et cachent la ripaille de cette table avant que Margarido n'arrive.
Margarido est revenue, elle poursuit tous ces personnages qui ont fait du bruit pendant son repos.
C'est l'ange qui apparaît pour leur intimer à nouveau d'aller à Bethléem.
Margarido demande à Pistachié de nourrir et d'abreuver l'âne pendant qu'ils vont faire un tour pour goûter le vin de Pimpara.
Pistachié est penché sur le puits pour tirer de l'eau, le Boumian arrive dans son dos, de peur Pistachié tombe dans le puits.
Ils reviennent tous de chez Pimpara, cherchent Pistachié, l'entendent au fond du puits et l'en sortent.
Puis ils partent tous vers Bethléem.
Acte 4
Cet acte n'est quasiment jamais présenté, c'est un acte court qui montre Hérode recevant les Rois Mages qui sont déjà à la recherche de cet heureux évènement signalé par une étoile dans le ciel. L'acte est en français pour bien montrer la différence entre le peuple provençal et la haute qui est représentée par Hérode.
Acte 5
C'est enfin l'arrivée de tous à la crèche pour rendre hommage au nouveau né entouré de Marie, Joseph, l'âne et le bœuf.
C'est d'abord un des valets de la ferme qui a prêté son étable à Joseph et Marie qui s'approche inquiet de ce bruit et qui découvre l'enfant Jésus.
Chacun va apporter ses offrandes et promettre de devenir meilleur.
Les bergers et les voisins.
Pimpara le rémouleur et Barnabèu le meunier.
Pistachié et Jigèt arrivent et ce dernier retrouve la parole fluide.
Puis ce sont les vieux et Jourdan et Margarido s'embrassent et cessent les disputes.
Le bohémien et son fils mais ils vont au fond de l'étable.
L'aveugle et son fils recouvre la vue et reconnaît son fils aîné volé dans le fils du Boumian.
Celui-ci rejoint son vrai père
Le Boumian lui aussi reconnaît la gloire de Jésus en échange de sa rédemption future, il va quand même faire un peu de purgatoire, il abandonne ses attributs de malfaisant, poignard et cape rouge et noire et demande pardon.
La pièce se termine sur "Rèi de Glori", une autre musique superbe de toute cette pièce chantée tout du long.
O Rèi de Glòri
